Quels droits de propriété intellectuelle sur les créations graphiques (logo, image…) ?

Les créations graphiques sont associées à des droits de propriété intellectuelle. Que ce soit un logo, une illustration… à partir du moment où l’image a été créée alors il y a un créateur, on l’appelle aussi auteur. Dis comme ça, c’est assez simple. Savez-vous que cet auteur possède des droits ?
Les droits de propriété intellectuelle devraient être connus et respectés par tous. Tout simplement car notre vie est remplie d’images, de contenus diffusés sur tous les supports dont les réseaux sociaux. En tant que graphite, il m’importe d’avoir un discours clair envers ma clientèle car la cession des droits est obligatoire et ces règles sont une protection pour utiliser une création.

Dans cet article, je vous explique notamment pourquoi un logo ne peut être utilisé que dans le cadre de la cession des droits convenue.

1) Les droits de propriété intellectuelle : quelques définitions

a) La propriété intellectuelle

La propriété intellectuelle regroupe la propriété industrielle et la propriété littéraire et artistique. Ce terme désigne toutes les œuvres de l’esprit dont les créations graphiques, les dessins et modèles et les signes de marques (logos…).

Depuis 1992, le Code de la propriété intellectuelle (CPI) rassemble les lois permettant aux créateurs d’obtenir une reconnaissance et une protection. Il définit les atteintes à la violation des droits : plagiat, contrefaçon, appropriation illicite… et leurs sanctions.

b) Le droit d’auteur

Dans le Code de la propriété intellectuelle on distingue les droits moraux et les droits patrimoniaux.

Les droits moraux : 
Ils protègent le créateur et son œuvre. On parle souvent de « droit d’auteur » pour mentionner les « droits moraux ». Ce droit est possédé par le créateur du fait même de la création de l’œuvre. Les droits moraux sont :

    • inaliénables : ne peuvent être cédés
    • imprescriptibles
    • perpétuels : pas de limite dans le temps. Après le décès du créateur, les ayants droit peuvent ainsi exercer ce droit même si l’œuvre est tombée dans le domaine public.

Ils permettent à l’auteur :

    • le droit de paternité : droit au créateur d’apposer son nom ou de rester anonyme
    • le droit de respect de l’intégrité de l’œuvre
    • le droit de divulgation : décider de la diffusion et de l’utilisation de l’œuvre
    • le droit de repentir ou de retrait de l’œuvre. Et également, et c’est important, de percevoir une rémunération en contrepartie de l’exploitation.

Les droits patrimoniaux ou « droits d’exploitation » sont cessibles et transmissibles. Ils permettent d’utiliser l’œuvre et à son créateur d’obtenir une rémunération sur son utilisation à travers :

    • le droit de représentation (art. L122-2 du CPI) : le droit de communiquer l’œuvre au public,
    • le droit de reproduction (art. L122-3 du CPI) : le droit de fixer l’œuvre sur un support afin de la diffuser,
    • le droit d’adaptation : permet à l’utilisateur de modifier l’œuvre afin de l’adapter au support de diffusion,
    • le droit de suite (art. L122-2 du CPI) : dans les domaines des arts graphiques et plastiques, il permet à l’auteur de percevoir un pourcentage sur le prix de revente de ses œuvres.

 

c) Le plagiat et la contrefaçon

S’inspirer d’images cela fait partie du processus de création graphique, ici la recherche d’inspiration a pour objectif de créer de la nouveauté. Je tiens à vous parler de pratiques très répandues : le plagiat et la contrefaçon, terme employé par le Code de propriété intellectuelle. C’est donc copier ou s’approprier l’œuvre, totale ou partielle, sans avoir socialité le créateur : une pratique illicite et condamnable. C’est très courant et tous les types de création sont concernés : texte, logo, image, illustration, photographie, site internet… Utiliser un logo hors du cadre défini dans la cession des droits est donc un délit de contrefaçon. Ce n’est ni plus ni moins qu’une violation des droits de la propriété intellectuelle (art. L.122-4 du CPI).

« Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droits ou ses ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque. »

Ces droits s’appliquent bien partout, Instagram mentionne dans sa politique  »Vous pouvez uniquement publier du contenu sur Instagram s’il n’enfreint pas les droits de propriété intellectuelle d’un tiers. »

droits propriété intellectuelle

2) Comprendre la cession des droits et ses mentions obligatoires

a) Qu’est-ce que la cession des droits ?

C’est un contrat rédigé par le créateur de l’œuvre, par exemple le graphiste, qu’il faut prendre le temps de définir avec le client. En effet, ce document a une valeur juridique. Pour la prestation demandée, que ce soit la création de logo, de charte graphique, d’identité visuelle… vous passez un accord afin d’obtenir légalement des droits d’exploitation. La cession des droits est indispensable. Elle permet au créateur et au client d’avoir un cadre légal sur ce que chacun peut faire ou non. Sans cession, si subitement le graphiste refuse que vous continuez à utiliser votre logo vous seriez bien embêté ! Alors que doit contenir ce document pour être légalement valable ?

b) Les mentions obligatoires

Le graphiste et son client déterminent ensemble les conditions de cession de la création afin d’en être entièrement satisfait. Pour toute création effectuée par un graphiste, il est important que la cession des droits soit mentionnée dans le devis et la facture (en annexe ou non). Les limites de la cession doivent être détaillées (art. L.131-3 du CPI) :

  • la nature des droits cédés : droits de représentation, reproduction, adaptation…
  • le domaine d’exploitation, sa destination et sa portée (ne pas hésiter à être précis) : site internet, réseaux sociaux, support papier (formats et nombre de tirages), presse (numéros concernées), télévision… Préciser la destination : usage public ou privé, communication internet, publicité, non commercial…
  • la durée de la cession : en mois ou années
  • l’étendue géographique de la cession : nationale, européenne, ou mondiale

Par défaut, tout ce qui n’est pas mentionné dans le contrat de la cession est interdit et revient à enfreindre la loi (art. L.122-4 et L. 335-3 du CPI). Attention à la pratique de certain.e.s professionnel.le.s ! Les mentions imprécises, telles que « cession illimitée » ou « tous droits cédés » ou « toutes utilisations », n’ont aucune valeur de cession et rendent le contrat caduc. Ce serait une perte de temps et d’argent pour vous, car le créateur pourrait interdire l’utilisation de la création de façon soudaine.

c) L’avantage d’une cession bien définie

La cession des droits est un document fait sur-mesure pour chaque prestation. Le prix de la cession des droits est calculée selon l’exploitation de la création. Cela vous permet de choisir la durée et les modalités de l’exploitation, donc par exemple de ne pas payer pour 10 ans si vous envisagez qu’il est fort possible que dans 6 ans ne vous convienne plus. Il est important de prendre un temps de réflexion afin d’y conclure les utilisations futures envisagées.

d) Prolonger la cession des droits

Vous avez convenu d’une cession des droits pour votre logo ou charte graphique et désormais souhaitez d’autres utilisations ?

Il est tout à fait possible de demander à étendre la cession des droits. Il est important d’anticiper la fin de la cession afin d’être en règle. Selon vos besoins, le ou la graphiste prolongera la durée en modifiant ou non les caractéristiques de cession. Vous obtiendrez un nouveau document de cession, le graphiste vous demandera donc une nouvelle rémunération.

 

La cession de droits est un document fait surmesure pour chaque prestation. Le prix de la cession des droits est calculée selon l’exploitation de la création. Cela vous permet de choisir la durée et les modalités de l’exploitation, donc par exemple de ne pas payer pour 10 ans si vous envisagez qu’il est fort possible que dans 6 ans ne vous convienne plus. Il est important de prendre un temps de réflexion afin d’y inclure les utilisations futures envisagées.

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3) Protéger ses créations et faire valoir ses droits

a) Se renseigner sur une protection adaptée

Il peut être intéressant de protéger une création que l’on soit le créateur ou l’utilisateur. Plusieurs alternatives payantes s’offrent à vous. Vous avez convenu d’une cession des droits avec le graphiste et souhaitez obtenir une protection en cas d’usurpation ou contrefaçon : il faut déposer la marque à l’INPIL’Institut National de la Propriété Industrielle est l’organisme public avec le monopole de délivrance des titres de propriété intellectuelle. Dans le cas d’un logo, il sera alors protégé par le droit des marques en tant que marque figurative. C’est un processus payant qui prend plusieurs mois puisque le dossier est étudié en profondeur, aussi s’assurer que la nouvelle marque n’est pas une contrefaçon.

Attention ! Un logo issu de Canva ne peut être protégé. La politique de Canva est claire : tout élément graphique sur leur site n’est pas exclusif et ne permet pas le dépôt de marque.

D’autres sites proposent des services accessibles et rapides pour protéger ses créations grâce aux technologies, notamment la blockchain. Le dépôt en ligne permet d’obtenir en quelques minutes un certificat valable à vie. C’est la preuve numérique par l’horodatée du fichier source qui permet de prouver que vous en êtes l’auteur. Selon vos besoins, il est fort possible que vous trouviez la solutions avec Ipocam, Fidealis ou Datasur (par Certisure).

b) Votre contenu a été volé, contrefait

Si vous êtes victime d’un délit de contrefaçon, il est important de réagir rapidement. Dans les cas les plus sérieux, préférez être accompagné.e d’un.e avocat spécialisée dans les droits de Propriété intellectuelle.

  1. Enregistrer et multiplier les preuves (captures d’écran, lien URL, photos…)
  2. Signaler le contenu (ci-celui est en ligne) avant qu’il ne soit supprimé. Par exemple sur Instagram, signaler le compte pour « Atteinte à la propriété intellectuelle »
  3. Réclamer : Le retrait (ou la destruction selon le support) du contenu : effectuez votre demande via message privé, mail ou courrier recommandé selon l’ampleur du délit. Rappeler les articles du Code de la propriété intellectuelle, ou le contrat de cession des droits s’il s’agit de votre client. Le paiement d’une cession des droits sur l’exploitation de l’œuvre ainsi que les dommages et intérêts.
  4. Selon la réponse de l’intéressé.e, vous pouvez également contacter l’hébergeur du site (selon le cas).
  5. Faire valoir vos droits en justice. Des consultations juridiques gratuites existent dans de nombreuses villes. Il y a aussi les associations dont Alliance France des Designers (AFD).

 

Les droits de propriété intellectuelle pour les créations graphiques est un sujet assez complexe, cet article ne prétend pas aborder toutes les situations. Que l’on soit graphiste, client.e ou utilisateur.rice de Canva, il est important de connaître nos droits et les appliquer. En tant que graphiste, le respect des droits liées à la création m’importe énormément. Il me semblait important d’aborder le débit de contrefaçon puisque c’est malheureusement très répandu, même pas certain.e.s « graphiste.s » ! Vous l’avez compris, le respect et l’éthique sont au cœur de mes préoccupations.

 

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Sources principales :

    • Inpi.fr
    • Moya, Julien, Delamarre, Eric, Profession Graphiste Indépendant, Eyrolles, 2017

Sources photos

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